MILHAUD, DENISE née LEON
L’Entraide Temporaire est fondée avec le concours de militantes catholiques, protestantes et juives. Née de cette association entre différents notables, l’Entraide Temporaire se consacre à partir de 1942 au sauvetage des enfants juifs privés de leurs parents. Elle est une œuvre privée, clandestine et multiconfessionnelle. L’E.T. ne possède aucune vitrine légale et agit dans deux secteurs : celui des adultes, dont la responsabilité incombe à Madame Béchard, épouse du directeur du centre de recherche de l’agence Kuhlmann à Paris et recommandée par le Pasteur Bertrand, responsable des protestants en zone nord. Le secteur des enfants est confié à Denise Milhaud, qui rejoint l’Entraide Temporaire en mars 1941. (…)
Denise Milhaud et son époux, le docteur Fred Milhaud, déchu de ses fonctions à l’hôpital du Val-de-Grâce en raison de ses origines juives, sont engagés parallèlement à leur activité dans l’E.T. au Centre Médical de l’U.G.I.F., où le docteur Milhaud est appelé par le Professeur Weill-Hallé pour y exercer en tant que médecin des centres d’enfants. Ce dernier demande également à Denise Milhaud d’assurer la fonction d’assistante sociale en chef des centres d’enfants et des dispensaires.
La réputation de l’U.G.I.F. d’organisation piège dans les milieux de la résistance fait hésiter les Milhaud à y entrer. De plus, le docteur Milhaud, israélite de vieille souche française, s’oppose fortement à l’idée reçue que les persécutions épargneront les Juifs français, parce que Français. Finalement Denise et Fred Milhaud acceptent à la condition de pouvoir poursuivre leurs activités au sein de l’Entraide Temporaire. Denise Milhaud prend ses fonctions au sein de l’U.G.I.F. à partir de juin 1942, date à laquelle elle devient en parallèle Présidente de l’Entraide Temporaire. Elle y est placée sous l’autorité directe de Weill-Hallé et ne dépend en aucune façon du service social de l’U.G.I.F. dirigé par Juliette Stern. Ami intime des Milhaud, le Professeur Weill-Hallé a parfaitement connaissance de leurs activités clandestines.(…)
A partir de 1942, la priorité est donnée au sauvetage des enfants pour les soustraire aux camps de concentration. L’Entraide Temporaire utilise, pour le maquillage de leurs identités, un livre de caisse de l’année 1921 d’une association devenue inactive, le Sauvetage de l’Enfance. L’Entraide Temporaire inscrit sur les pages restées libres, les dons reçus, le nom des enfants, leur état civil, celui des parents avec leurs noms et adresses, ainsi que les lieux de placements.
Les dates de naissance et la prise en charge sont décalées de 20 ans. Les indications figurant sur les fiches des enfants sont codées : la mention » à Biarritz » signifie que les parents sont à Drancy, tandis qu’ » à Bayonne » indique que les parents ont été déportés. Un fichier conservé à l’Hotel Stella, 41, rue Monsieur le Prince à Paris, contient la fausse identité des enfants, ainsi que le pseudonyme de la personne de l’Entraide Temporaire qui les suit.[3] Le docteur Milhaud se procure de faux papiers par l’intermédiaire de la C.G.T. clandestine, avec laquelle il est en relation dans la Résistance.
Dans son activité de sauvetage des enfants, Denise Milhaud a pour secrétaire à l’Entraide Française, Arlette Beaumont, fille adoptive du Professeur Beaumont, puis Hélène Berr qui fut déportée avec ses parents, et enfin Nicole Schneider. A l’U.G.I.F. son assistante Madame Loeb, participe aux actions clandestines qui demeurent ignorées de la plupart des dirigeants. Les enfants sont cachés dans de nombreux endroits : dans des fermes, des institutions religieuses et laïques et des pensionnats.
Source : Les enfants cachés pendant la seconde guerre mondiale aux sources d’une histoire clandestine
